Gérard Étienne au congrès du CIEF à Liège, en juin 2004

photo C. Perry, Liège, juin 2004 ( © CIÉF)

En souvenir de Gérard Étienne

(Cap-Haïtien, 28 mai 1936 – Montréal, 14 décembre 2008)

Hommage à Gérard Étienne sur le site des Éditions du Marais

Page consacrée à Gérard Étienne sur le site Île en île

"L’Acadie en deuil d’un grand homme de lettres," L'Acadie Nouvelle (16 décembre), et article de Claude Le Bouthillier, "Gérard Étienne: grand humaniste et écrivain exceptionnel" (8 janvier 2009).

Page sur Gérard Étienne pour le congrès 2004 du CIÉF à Liège

Page bio-bibliographique sur la poésie de Gérard Étienne, par Saint-John Kauss, et son poème dédié à Gérard Étienne


Texte de Gérard Étienne pour le numéro anniversaire de Nouvelles Études Francophones, printemps 2007, célébrant les 20 ans du CIÉF

"Le CIÉF, un organisme qui fait la force de la francophonie"

Vingt ans déjà. C’est comme si c’était hier. Sur l’invitation du pionnier, du visionnaire Maurice Cagnon, un groupe de jeunes intellectuels et universitaires s’étaient réunis dans un hôtel de la Nouvelle Orléans où ils allaient poser les fondements d’une association appelée à jouer un rôle déterminant dans le rayonnement et dans l’évolution de la francophonie. Les premiers jalons du CIÉF étaient donc posés en présence de figures déjà bien connues: Édouard Glissant, Marie-Claire Blais, Myrna Delson-Karan (Déléguée générale du Québec à New York) et d’autres collègues (dont Jean-Marc Gouanvic) anxieux de se donner un espace de réflexion où ils ne sentiraient pas les pressions d’une oligarchie qui imposât un certain cadre idéologique sur leur pensée et sur leur manière originale d’interpréter des travaux littéraires. On sentait tout de suite, à l’intérieur du groupe, l’ardent désir de combler un vide quant à l’expansion de la francophonie dans le monde universitaire et dans celui des créateurs/éditeurs, vide qui trouvait un écho chez Maurice Cagnon au point de fonder une association qui allait devenir très tôt un lieu de conviction intellectuelle, de solidarité professionnelle, d’instants étincelants, brillants, merveilleux. Et c’est ainsi que deux ans plus tard, grâce au leadership éclairé de Maurice Cagnon, le cercle s’est agrandi, favorisant l’éclosion d’un espace de paroles à travers la francophonie mondiale.


Pour moi, personnellement, le CIÉF représentait (et représente encore) une lumière au cœur de l’obscurité découlant, comme toujours, de cette longue bataille qu’il faut mener contre les forces rétrogrades qui nous font la vie dure dans nos institutions. Ce fut la découverte, dans nos congrès, de figures de proue de la francophonie comme Aimé Césaire (qui n’en revenait pas de ce qu’il appelait la colonisation d’une Blanche parlant couramment le créole haïtien: il s’agit de ma femme Natania), de Myrna Delson-Karan, de la célèbre écrivaine Marie-Claire Blais (dont La Belle Bête et Une Saison dans la vie d’Emmanuel devaient signer ma trajectoire romanesque sur le plan de l’esthétique de la vérité), d’André et Simone Schwarz-Bart (dont la visite dans un hôtel de la Guadeloupe a été pour Natania et moi un grand honneur mais aussi un moment privilégié d’échanges sur des valeurs communes). Sans parler des collègues qui ont élargi mon horizon: écrivains antillais, africains, français, tunisiens, marocains, roumains, québécois, acadiens, louisianais, anglais, allemands, américains, espagnols, sud-américains, chez qui j’ai trouvé un écho jamais lointain ni séparé de mes préoccupations subjectives et intellectuelles.

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Témoignages de membres du CIÉF

Nous avons reçu des témoignages émouvants de membres du CIÉF qui ont tenu à envoyer une note de sympathie pour Natania et toute la famille de Gérard Étienne. Nous avons rassemblé ces témoignages pour les reproduire ici en hommage à Gérard (à l'exception des mots personnellemnt adressés à Natania Étienne). Les témoignages sont organisés par ordre alphabétique des contributeurs, sauf pour le premier, de Bénédicte Mauguière, rédigé au nom du CIÉF. Nous inscrivons aussi la date de chaque témoignage car nous continuons d'en recevoir.

 

Bénédicte Mauguière, Directrice générale du CIÉF (15 décembre)

Gérard Étienne, ce grand ami du CIÉF et un de ses piliers depuis toujours, récipiendaire du Certificat d'honneur au congrès de Toulouse en 1996, nous a quittés. Gérard fait partie intime du CIÉF depuis si longtemps qu’il est difficile de penser à l’association sans lui.

Né au Cap-Haïtien le 28 mai 1936, il a vécu l’emprisonnement et la torture en Haïti et sa vie aura été un combat constant contre l’injustice et l’arbitraire. Malgré deux comas et une opération au cerveau, il continue à écrire dans plusieurs hebdomadaires, il publie des essais, des romans et une pièce de théâtre. Infatigable combattant des droits de la personne (voir L'Injustice, La Désinformation, Le Mépris de la loi), il poursuit sa lutte pour le changement dans son pays d'origine. Au cours de 2008, Gérard Etienne aura eu la chance de voir montée sur scène sa pièce de théâtre Monsieur le Président.  Gérard donnait le courage de persévérer à ceux contre qui les forces de l’intolérance et de l’arbitraire s'acharnaient. Sa dernière oeuvre publiée aux Éditions du Marais en 2008 est le recueil de poésie dédié à sa compagne de toujours, Natania.

Le CIÉF lui a rendu hommage lors de son dernier congrès en juin dernier, à Limoges. On se rappelle son intervention émouvante durant la Table ronde à laquelle il était convié et l’hommage du public qui a suivi. Malgré sa grande fatigue, il a trouvé la force d’assister à plusieurs sessions ainsi qu’au Conseil d’Administration durant lequel il est intervenu avec passion en faveur des jeunes dont il avait l’avenir tellement à coeur. Les étudiants qui ont eu la chance de le rencontrer en parlent comme d’un modèle et une source d’inspiration. Ses collègues admiraient son intégrité personnelle, son honnêteté intellectuelle et la force de ses convictions. Gérard est une figure inoubliable qui a marqué la littérature haïtienne et québécoise.

au congrès 2003: Gérard Étienne, Catherine Perry, Natania Étienne, Marie-Claire Blais, Bénédicte Mauguière

Souvenir amical du congrès de La Nouvelle Orléans en 2003, où Gérard et Natania Étienne se détendent en compagnie de Catherine Perry (Présidente du CIÉF 2003-2005), Marie-Claire Blais (récipiendaire du Certificat d'Honneur Maurice Cagnon 2003) et Bénédicte Mauguière (Directrice générale du CIÉF depuis 2001).

Photo C. Perry (© CIÉF)

Le Dalaï Lama
(photo et texte envoyés
par Bénédicte Mauguière,
qui les a reçus justement
le 15 décembre )

On a demandé au Dalaï Lama...

"Qu'est-ce qui vous surprend le plus dans l'humanité?"

Il a répondu:

"Les hommes... Parce qu'ils perdent la santé pour accumuler de l'argent, ensuite ils perdent de l'argent pour retrouver la santé.

Et à penser anxieusement au futur, ils oublient le présent de telle sorte qu'ils finissent par ne vivre ni le présent ni le futur.

Ils vivent comme s'ils n'allaient jamais mourir...

... Et meurent comme s'ils n'avaient jamais vécu."

Au contraire, Gérard Étienne, lui, aura réellement vécu.
Sa vie demeure pour nous tous un témoignage exemplaire.

Le Dalaï Lama

 

Fernand Arsenault (29 janvier 2009)

Cap-Pelé, le 29 janvier 09

Mon cher Gérard,

Comme j’ai été heureux de lire ta lettre du 12 décembre dernier. J’étais tellement fier de te retrouver plein de projets malgré une santé plutôt fragile. Fier aussi de constater que tu es toujours follement amoureux de ta Natania. Je te comprends très bien quand tu me dis que le livre que tu viens d’écrire sur Natania se veut une danse de reconnaissance face à l’univers, une grande déclaration d’amour pour « cette jeune fille de 19 ans qui m’a sauvé plusieurs fois de la mort ». Si j’avais ta plume, je ferais ce même cadeau à ma Ghislaine! Gérard, tu n’as pas changé et c’est comme ça que je t’aime.

Mais qu’est-ce qui t’a pris de nous quitter aussi précipitamment pour entrer dans la maison de ton Père? Comme on dit par chez nous, tu as bien failli me faire faire une syncope! Ça m’a pris jusqu’à aujourd’hui pour accepter ton départ. Mais ici encore, je te comprends. Tu as tellement rêvé d’un monde de justice, de lumière et de fraternité pour tous tes frères et sœurs d’Haïti et du monde entier! Quand tu as vu la porte s’entrouvrir, tu n’as pas résisté à l’attrait de la Terre promise. Tu sais bien que je te le pardonne, mon frère et mon ami. Je te vois déjà en train de nous préparer une place tout près de toi et je sais que tu continueras à partager les immenses richesses de ton coeur avec Natania, Joël, Michaëlla, et tous tes amis d’Haïti et d’Acadie.

Merci Gérard pour avoir si bien épousé les rêves, les luttes et les grandes réalisations de tes sœurs et frères acadiens! Sur plusieurs de nos chantiers, tu as été un merveilleux et solide ouvrier. Je pense au Programme d’Info-Com dont tu as été le fondateur, à ton importante contribution au développement de la Faculté des arts, à ton implication dans les journaux acadiens et à l’Association des écrivains acadiens. Tu as été avec nous dans tous nos combats. Nous avions peu de moyens, peu de personnel, mais nous étions riches en rêves et en amitié.

Gérard, tu as toujours porté dans ton cœur et sur tes épaules les lourdes épreuves de tes frères et sœurs d’Haïti. Nous avions mal avec toi. Plusieurs belles collaborations entre l’Acadie et Haïti sont probablement nées de cette souffrance commune. Jusqu’à la fin, tu as lutté avec passion pour que le berceau qui t’a vu naître puisse voir enfin se lever le soleil de l’espoir et de la dignité pour tous. Ton courage et ta détermination nous inspiraient et nous motivaient à rêver grand, nous aussi, pour nos frères et sœurs d’Acadie. Nous n’étions pas toujours d’accord, mais personne ne doutait de ta sincérité, de ton attachement profond à ton Acadie d’adoption. Tu nous disais avec conviction : « Je suis Noir, Juif et Acadien! Quelle merveilleuse et très rare identité! »

Merci Gérard pour avoir été parmi nous un artiste de la parole, un grand poète, un écrivain reconnu et apprécié en Acadie et dans la grande famille internationale des écrivains. Plusieurs de nos poètes et écrivains reconnaissent qu’ils auront toujours une profonde dette de reconnaissance envers toi. Merci Gérard, à toi et à Natania, pour les belles soirées et les excellents repas que tu préparais toi-même pour tes nombreux amis dans la chaleur de votre foyer. Que de beaux souvenirs! Tu te mettais au piano et l’on chantait pendant des heures tout le répertoire de nos plus belles chansons.

Merci Gérard pour ton rire puissant et contagieux. Ce rire venait souvent balayer les petits nuages qui trainaient parfois dans les corridors de la faculté et dérider ceux et celles qui prenaient un peu trop au sérieux les défis à relever! Merci Gérard pour ce beau poème dont tu me fis cadeau ce 30 janvier 1994. Tu te souviens? « Me voici dans le soir célébrant un ami… » Je le garde toujours bien en vue dans mon bureau avec la dernière photo que j’ai prise de toi. Tu es chez moi, au piano, et tu chantes ce grand amour qui a toujours transfiguré ta vie et ensoleillé ton entourage. Ton large sourire, en noir et blanc, me convainc à lui seul que l’amour est plus fort que la mort!

À Dieu, Gérard! Je t’aime beaucoup! Nous nous reverrons bientôt! Tu vas certainement croiser notre fils Jean-Pierre dans ta nouvelle demeure. Serre le très fort dans tes bras et dis-lui que nous l’aimons gros comme l’univers! Continue à nous envoyer, comme tu nous le dis, « les plus belles pensées de ton cœur »!

Shalom!

Fernand

P.S. – Ghislaine te remercie pour tes belles pensées. Elle te dit merci pour tout ce que tu as été et que tu es toujours pour nous. Lumière et Paix!


 

Nicolae Bârna (16 décembre)

Je suis fortement impressionné par la tragique nouvelle du décès de Gérard Étienne, personnalité si remarquable, que j’ai eu l’occasion de connaître lors du Congrès CIÉF à Sinaïa, en 2006, et dont j’ai toujours admiré les activités!

 

Corinne Beauquis (2 janvier)

De retour à Toronto, je me décide à prendre la plume pour rendre hommage à Gérard Étienne. Moment redouté. Moment repoussé. Pas envie de dire adieu.
J’ai eu la chance de tisser des liens avec Gérard Étienne ces dernières années et c’est sa générosité que j’aimerais souligner aujourd’hui. Il avait accepté de venir parler à une de mes classes à l’Université de Toronto Scarborough, en février 2006. Il souffrait alors d’un bon rhume, ou peut-être même d’une grippe, mais il ne m’en avait rien dit car, me rappela-t-il, il m’avait promis cette visite. Il était arrivé affaibli et c’est au moment il prit la parole que sa fougue habituelle effaça toute trace de fatigue. Après deux heures d’échanges devant un groupe d’étudiants avides de réponses à leurs questions, le pédagogue passionné avait accepté de continuer la discussion pendant le déjeuner. Natania l’accompagnait, comme toujours, comme elle ne cessera de le faire, sans aucun doute.
C’est cette même fougue que j’ai retrouvée quand j’ai entendu Gérard donner sa communication au CIÉF de Limoges en juillet 2008. Gérard disait qu’il ne lâcherait pas ses combats, et il nous invitait à poursuivre, les siens ou les nôtres.
Gérard Étienne, c’est une œuvre dont on n’a pas fini de parler.


Monique Blérald (15-16 décembre)

Je viens d’apprendre la triste nouvelle. J’ai encore en mémoire la gentillesse, le franc-parler de ce militant inconditionnel du CIÉF, que je connaissais peu. Je le revois encore à Limoges, soutenu par Natania et tenant à tout prix à prendre part malgré sa très grande fatigue au conseil d’administration et à différentes sessions. Le CIÉF a perdu un grand Homme.

Même si je ne connaissais Gérard que depuis peu de temps, comme tout le monde j’ai été conquise par son charisme, sa simplicité et sa gentillesse. Le Prix Gérard Étienne sera notre manière à nous de témoigner à notre ami notre reconnaissance... une reconnaissance éternelle.

 

Hédi Bouraoui (15 décembre)

Triste nouvelle pour le CIÉF et les ami(e)s du CIÉF. Personnellement j’éprouve une immense tristesse par la perte d’un ami avec lequel j’ai eu pas mal de discussions sur Haïti et les littératures francophones...

 

Gaëtan Brulotte (16 décembre)

La disparition de Gérard Étienne m’attriste et me révolte, c’est une grande perte pour le monde de l’écriture, et pour moi c’est la perte d’un ami de longue date, mais je me réjouis au moins d’avoir eu une dernière occasion de le revoir à Limoges l’été passé où il m’avait invité, sentant sans doute l’inévitable. Nous avions une grande complicité amicale et intellectuelle qui a duré de très nombreuses années. Sa verve, son intelligence des choses, sa soif de liberté, son esprit critique nous manqueront, et bien sûr son amitié fidèle.

Quel vide ce sera dans la communauté des écrivains.

 

Raymonde Bulger (15-17 décembre)

Cette nouvelle nous accable toutes et tous. Un congrès sans Gérard Étienne nous semble impensable tant sa présence était forte, flamboyante, son talent oratoire bouleversant parfois et toujours à point. À Limoges, il parlait de théâtre, surpris du succès de sa pièce. Gérard Étienne ne pourra être oublié pour son œuvre littéraire et sa personnalité å la recherche de la vérité, de la justice. L’écriture le libérait de la cause de sa souffrance et ses révoltes.

Continuons par le bon souvenir des éclats de voix de Gérard Étienne, de mettre au jour toute la littérature francophone qui combat pour la justice et la connaissance de l’Autre du monde entier.

 

Joëlle Cauville (15 décembre)

C’est effectivement une bien triste nouvelle. Le CIÉF ne sera plus le même sans Gérard Étienne, incontestablement une grande figure du Monde littéraire francophone.

 

Margaret Colvin (15 décembre)

C’est une nouvelle bien triste. Je me sens privilégiée d’avoir eu l’occasion de voir et entendre M. Étienne lors du congrès 2008 à Limoges. Quelle bonne fortune.

 

Jean-Yves Conrad (16 décembre)

Je reste sans voix.

Oui, il était un héros, un héros de sa terre natale qu’il aimait tant, un héros de la liberté de son grand peuple francophone.

Jean-Yves Conrad et Murielle Martin avec Gérard Étienne au château de Peles, Sinaïa, 2006

Photo Jean-Yves Conrad

Dans le pays de mon coeur, la Roumanie, jamais il ne se départissait de ce sourire propre à son île natale, Haïti, dont il louait chaque jour, chaque seconde, l’authenticité, la vérité francophone, malgré la pauvreté matérielle de son île, la passion de sa vie.

Alors qu’il venait d’atteindre ses 70 ans, son courage était bouleversant en Roumanie. Au château de Peles (à gauche ci-contre), le château des rois de Roumanie, construit par Carol 1er, le fondateur de la dynastie des Hohenzollern-Sigmaringen, c’était bien lui le prince, le prince du savoir, le prince de l’espoir, le prince du cœur.

Je n’ai connu que peu Gérard, aux côtés de Natania, mais il m’a marqué par son combat effréné pour la liberté de son peuple, pour la beauté de sa langue natale, le français.

Les petits déjeuners et repas en sa compagnie étaient des régals de sérénité, d’humanisme.

J’émets un rêve, qui doit devenir réalité: que le nom de Gérard soit donné à au moins une rue de Montréal et qu’un prix porte son nom. Ce ne serait que justice envers ce défenseur fidèle et émouvant de la francophonie. Je me battrai pour cela.

Gérard, là où tu es, tu es la conscience de ton peuple.

Merci pour ta lutte sans merci au service d’Haïti, ton île caraïbe qui te doit assurément un hommage national.

Puisse ton œuvre être publiée intégralement dans une édition digne de ce nom.

 

Myrna Delson-Karan (16-18 décembre)

J’ai appris avec beaucoup de tristesse la nouvelle du décès de mon cher ami et collègue, Gérard Étienne. Je me souviendrai toujours de sa brillance, de son esprit vif, et de son sens d’humour. J’ai eu le grand honneur de recevoir le Certificat d’honneur Maurice Cagnon en même temps que lui au congrès du CIÉF à Toulouse.

It était toujours une star à tous les congrès du CIÉF. Il a ajouté un éclat tout spécial à tous les événements auxquels il a participés.

Pendant que j’étais à la Délégation du Québec j’ai eu le plaisir d’organiser des tournées pour lui dans beaucoup d’universités sur mon territoire. Il a été reçu partout avec beaucoup d’enthousiasme et beaucoup d’admiration. Du côté personnel, il m’a toujours exprimé sa gratitude pour tout ce que j’avais fait pour promouvoir ses œuvres, qui vont durer, sans doute, pour l’éternité.

Nous sommes reconnaissants pour sa contribution exceptionnelle au CIÉF et au rayonnement de la culture québécoise et francophone. Il nous manquera beaucoup.

 

Danielle Dumontet (16 décembre)

Gérard nous a quittés…. Mais j’entends encore son rire tonitruant, je l’entends encore déclamer des vers de Victor Hugo, je le revois me dire son admiration pour Albert Camus, je le revois faire la cuisine, son riz aux haricots rouges et me dire, mais ma chère, il faut manger, mange, mange….. je l’entends encore essayer de m’expliquer Haïti, son Haïti chérie qui le faisait tant souffrir, et je l’entends encore chanter sa Choucoune de son pays perdu!

Gérard nous a quittés? Non, il continue de vivre dans nos cœurs!

 

Natania Étienne (8 mars 2009)

Haïti Observateur 4-11 mars 2009, p. 1-6
Vol. XXXX, no 10

11e semaine du départ de Gérard Étienne Z’L’
Par Natania Étienne

Quand je critiquais l’architecture de ce coin au nord du monde je ne réalisais pas que plus la brique est rouge plus l’argile contient de fer et est résistant au froid. Dire que les chariots d’argile amenaient des États-Unis non seulement la matière première nécessaire mais aussi les anti-esclavagistes qui profitaient pour dissimuler en dessous de leurs cargaisons les esclaves fuyant le sud. Cette brique était la porte de la liberté, la dernière étape du train souterrain vers le Canada. J’avais tellement idéalisé dans mon romantisme ce coin du monde, oasis de liberté selon les légendes que j’avais lues.
1967. C’était l’été de l’exposition de Montréal, le coût du passeport d’entrée était prohibitif pour une famille nombreuse, qu’importe, je suivais un cours de philosophie et paressais au soleil rêvant de rencontrer une âme sœur sans avoir vraiment une idée de ce que je voulais de la vie.
L’automne arrivé je ne me sentais pas prête pour l’Université, d’ailleurs à mon avis c’était bourgeois d’y aller, alors j’approuvais la proposition de mes parents de m’inscrire de préférence au Collège Brébeuf.

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Simone Grossman (22 décembre)

Admirable, exemplaire, Gérard Etienne que nous avons eu le mérite de connaître ne cessera d'être une part de notre être.

 

Yolande Helm (22 décembre)

C'est avec grand plaisir que j'anticipais de revoir Gérard (et Natania) à l'occasion du congrès du CIÉF. J’appréciais son rire contagieux et son "sou-rire" tout aussi attachant. J'avais parfois envie d'assister aux sessions uniquement pour entendre les réflexions de Gérard ; il y avait toujours tant de justesse et de lucidité dans ses propos. Je n'oublie pas Natania... ils formaient tous les deux un couple unique... ils ont mené ensemble et jusqu'au bout une vie qui les défiait... quelle vie...scélérate parfois mais fertile et riche en amour et en poésie. Je te souhaite bon voyage, Gérard et surtout une grande paix. Je pense aussi à toi Natania et je t'embrasse fort.

 

Kama Sywor Kamanda (16 décembre)

À l’occasion de la disparition du grand poète et écrivain haïtien, Gérard Étienne, je joins les membres du CIÉF pour présenter mes condoléances à Natania, sa chère épouse, ainsi qu’à leurs enfants.

Gérard était un grand penseur, un ami et un fidèle collaborateur du CIÉF. Il a apporté son dynamisme au service de notre communauté.

Il va nous manquer. Que son âme repose en paix!

 

Edwige et Gabriel Khaznadar (16 décembre)

Son grand rire continuera à retentir dans nos cœurs.

 

Claude Le Bouthillier (29 décembre et 7 janvier)

Je me promenais sur les routes de l'Acadie lorsque j'ai appris la triste nouvelle. Je voulais réagir plus tôt; je n'ai pas pu. Depuis Gérard m'habite et tant de souvenirs remontent. Ce fut un grand ami, un homme intègre, généreux, passionné. Il fut parmi le petit nombre d'écrivains qui ont constamment encouragé ma démarche même dans l'adversité. Il m'a présenté à des gens extraordinaire au CIÉF.

Ma chronique sur Gérard devrait paraître dans L'Acadie Nouvelle du jeudi 8 janvier. Gérard, je te croyais immortel et tu le seras par ton oeuvre immense qui transcende le temps et les cultures. Mon affection à Natania et aux enfants.

Gérard Étienne : grand humaniste, écrivain exceptionnel (article paru dans L'Acadie nouvelle le 8 janvier)

Gérard est un personnage hors du commun qui a oeuvré en Acadie pendant une trentaine d’années. Son combat contre toutes les injustices, que ce soit en Haïti, en Acadie ou pour l’égalité des femmes traverse son oeuvre littéraire immense : poète, romancier, linguiste, dramaturge, essayiste, journaliste, il avait le don de brasser les tréfonds de l’Acadie frileuse. Et dans toute oeuvre qui touche au social ou au sociologique, les dangers sont présents de dire des vérités qui choquent. Et bien sûr parfois il dérangeait comme tous les êtres passionnés qui n’ont pas la langue dans leur poche.

Gérard était un orateur hors pair. Il se servait des mots comme à une certaine époque on maniait l’épée. En Acadie il fut de tous les combats et des débats de société. Il fut un pilier des éditions d’Acadie, du département d’information-communication de l’Université où il a formé des journalistes crédibles et il a écrit des textes percutants. Il était capable de faire des compromis mais jamais de compromissions. Il ne louvoyait pas comme certains Acadiens et il n’était pas le genre comme d’autres à verser dans la flatterie et l’opportunisme.

Gérard Étienne incarnait aussi la loyauté, la discrétion, la générosité, la sensibilité aux êtres. Son grand éclat de rire, je l’entends encore. Et son excellente cuisine me fait encore saliver. Un bon vivant. Il a aidé nombre de poètes par son support, sa table et même des sous. Il fut pour moi en Acadie un des premiers - avec Melvin Gallant, James Definnay et d’autres - à m’encourager à publier. Son appui m’aida beaucoup car le métier d’écrivain s’il est source de grand bonheur est aussi difficile et les obstacles sont immenses pour persévérer dans ce privilège de parole, davantage peut-être dans une société aussi complexe que la nôtre. Il me fit rencontrer des gens superbes du Conseil International d’Études Francophones où il était un des pionniers. Je me souviens aussi de son rêve d’avoir en Haïti, une maison pour les écrivains où nous pourrions en tant qu’Acadiens nous y rendre. Je me souviens encore d’un fabuleux roman historique sur Haïti qu’il peaufinait sans relâche.

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Thierry Léger (20 décembre, message envoyé depuis la Chine)

Un des piliers de notre organisation, Gérard a profondément marqué le CIÉF par sa participation assidue aux congrès, sa capacité à nourrir de fructueux débats, sa passion pour promouvoir la liberté d’expression des exclus, ainsi que sa dénonciation de tous les abus. Bien sûr, ses nombreuses publications, toutes provenant du cri du cœur, resteront avec nous. Je me souviendrai toujours de sa belle participation au congrès du CIÉF à Limoges en juin dernier, et de son désir d’être parmi nous malgré ses problèmes de santé. Je me souviendrai aussi de son soutien indéfectible envers les jeunes chercheuses et chercheurs de notre organisation en qui il voyait le futur du CIÉF et de la recherche en Études Francophones. Aussi pénible que soit son départ dans l’autre monde, une part de Gérard restera avec nous au sein du CIÉF.

 

Béatrice Libert (16 décembre)

Je dois dire tout de suite ma peine, mon émotion à l’annonce du grand départ de Gérard.

Je garde de lui le souvenir d’un homme entier, attentif aux autres, aimant et généreux. Son accueil au CIÉF m’a toujours touchée. Son rire était celui d’un homme qui avait faim et foi en la vie. Ses livres resteront comme des témoignages poétiques et forts.

ADIEU À L’ARTISTE, ADIEU À L’AMI
(poème écrit naguère après la mort d’un ami)

L’ami que nous perdons
porte nos noms et nos visages
Il est assis sur la pierre du seuil
les yeux tournés vers le jardin
où nous allons encore malgré notre chagrin
Le temps nous dévisage
La saison nous escorte
L’ami serre en sa paume
un peu de cette terre
qu’il a su tant chérir
un fragment de ce feu
dont il a tant brûlé

L’ami que nous perdons
porte soleil et nuit
dans la joue de nos aubes
Il est ailleurs Il est ici
Au pré de son silence
nous irons maintes fois
fouler l’herbe qui garde
la trace de son pas

L’ami que nous quittons
porte le poids de l’heure
amère et convulsive
Soyons doux à ceux qui restent
seuls amputés amoindris
Le sel des larmes ne peut tarir
la source qu’un jour il nous a révélée

 

Matilde Mésavage (20 décembre)

Merci infiniment pour ce bel hommage à notre ami à tous. C'est une ironie du sort que j'ai fait sa connaissance à la Nouvelle-Orléans il y a tant d'année, et qu'en 2009, le CIÉF aura lieu encore une fois dans cette ville qui a tant souffert, mais que Gérard ne sera plus là. Quelle perte, quelle tristesse qui nous touchent tous ! Merci encore une fois pour cette belle page qui l'honore. Il y a beaucoup qui le pleurent, et nous le porterons toujours dans nos cœurs.

 

Jean Métellus (15 décembre)

J’ai connu Gérard Étienne il y a une quinzaine d’années, je l’ai rencontré pour la première fois à Strasbourg au cours d’une réunion du CIÉF, il était accompagné de sa femme Natania, je l’ai rencontré à nouveau à Casablanca et récemment à Liège. Nous sommes restés en contact, j’ai suivi attentivement ses nombreuses interventions dans des réunions internationales et j’ai lu avec grand intérêt sa chronique régulière, “La Révolution (tranquille) haïtienne,” dans Haïti Observateur.

Sa disparition constitue une très grand perte pour Haïti, pour les communautés haïtiennes de l’étranger et pour le CIÉF dont il était un membre actif, efficace et prestigieux. C’était un écrivain de valeur et un défenseur passionné de son pays.

 

Joseph Mwantuali (21 décembre)

Gérard l’exorciste.

C’était un guerrier, Gérard. Un soldat de la liberté et de la justice, Le Nègre crucifié témoignera à jamais du Golgotha qu’il a enduré au nom de son Haïti chérie. Dans l’exil sans fin né de là, il n’a fait que ça: combattre l’injustice. Par sa plume et par sa langue. Il n’y a pas meilleur témoignage que la couverture de son ouvrage L’Injustice: visage tuméfié, chemise maculée de sang, il venait d’être rossé sur sa route vers une chaîne de télévision où il allait parler contre ceux qui, dans la misère du peuple haïtien, vivaient, eux, en Princes.

Ceux qui ont pris l’avion avec lui à destination d’Abidjan, lors du congrès du CIEF en 2002, se souviendront de l’incident de Charles De Gaule: déchaîné, son éternel béret à la Che Guevara sur la tête, brandissant sa carte de Presse à la face des soldats armés, au risque de se faire incarcérer ou pire…, Gérard Etienne a pu, tout au moins momentanément, empêcher l’embarquement dégradant d’un jeune Africain dans un charter de la honte.

Toutes ces peines, toutes ces blessures, toutes les humiliations reçues « au nom de tous les siens », Gérard Etienne les portait en lui avec stoïcisme et un total don de soi. Contaminateur était son rire de fanfare, signe d’une confiance en soi inébranlable. Son roman Vous n'êtes pas seul dit tout du combat que Gérard Etienne a mené jusqu’au bout au nom de tous les « damnés de la terre ». Au regard de la vie de Gérard Etienne, un grand nom me vient vite à l’esprit: Jean-Paul Sartre. Et, malgré tout, ce baobab de la littérature canado-négro-africaine est resté simple, modeste, affable, conscient et fier de ses racines. Il compte pour moi parmi la race des rares enfants des « Afriques » que j’appelle Exorcistes.

Gérard, tu m’appelais petit frère. Merci de m’avoir servi d’inspiration. Tu auras mérité le repos, dans cet autre Plan de Conscience où, j'en suis sûr, tu peux enfin jouir de Justice et de Paix Profonde.


Colette Nys-Mazure (24 décembre)

J'apprends la mort de Gérard Etienne. Je le revois avec Natania à la terrasse d'un café de Strasbourg lors de ma toute première participation au congrès du CIEF : exubérant, chaleureux, rieur, extravagant. Ensuite ce furent ses interventions qui ne passaient jamais inaperçues lors des tables rondes et des communications. Au fil du temps, j'ai découvert l'homme plus fragile sous ses dehors à tous vents et, lors du dernier congrès, j'ai admiré son courage en dépit de son état de santé. Lors du séjour d'un de mes enfants au Québec, j'ai pu aussi apprécier son sens de l'accueil.

À Natania et lui, je dédie ces deux poèmes écrits dans des circonstances analogues :

Issue des lisières (L'Arbre à paroles)


On prononce mort
comme on chuchote amour
sans retenue ni connaissance

Seules
l’intrusion brute
la prise incandescente
l’expérience à ras de vie
              livrent effroi et ferveur

Nous allons sans savoir, obscurcis et chancelants. Ta main ne soutient plus la nôtre et ta voix est si basse que nous ne l'entendons plus. Nous interrogeons les murs et les nuages. À qui adresser les reproches, les insultes qui nous échappent : pourquoi elle ? Pourquoi si tôt ? Et nous ? Et moi ?
Nous nous cognons aux questions sans interlocuteur. Nous marchons cependant, comme elle avançait. On a parlé d'une lueur, d'une clarté, le troisième jour. L'espérance est chevillée à la douleur.

Ce matin, la neige et un rouge-gorge? La mort écrouée sous tant de clarté.

 

Enfance portative (Éditions de l'Esperluète)


Quelqu'un est passé de l'autre côté,
                                                          transi
              et nous aussi, glacés.

Jamais plus,
                         le chuchotement de ton pas,
                         le viol du seuil,
                         le couvert à ta place,
                         le haut rire du soleil
                                                        sur ta nuque.

Encore toujours,
                          le frisson du matin en ombelles,
                          le froissement de l'eau,
                          la lente remontée des foules en fête,
                          le baume de l'averse,
                          l'accord complice d'une présence,
                                          le sourd secret  souterrain.                                                         

                                                                  (outre-tombe)

 

Catherine Perry (15-18 décembre)

J'avais beau me préparer pour cette nouvelle, c’est un choc immense. Heureusement que j’ai eu l’honneur et la joie d’être à côté de Gérard l’été dernier, pour la table ronde du congrès de Limoges. Et quelle merveilleuse présentation il a donnée, sans parler de l'intervention de Natania ensuite. Instants mémorables pour toute l'assemblée.

Je n’oublierai jamais ma première rencontre avec Gérard, lors de ma découverte du CIÉF en Guadeloupe en 1997, durant l'excursion du congrès dans un parc magnifique. Je l’ai vu, entouré d’une végétation luxuriante, souriant, heureux, portant une chemise rouge vif et tenant à la main des mangues qu'il venait de cueillir! Quelle image splendide il m’a présentée alors, si belle que je lui ai demandé, sans même le connaître, si je pouvais le photographier. Et maintenant je conserve ce précieux souvenir.

Gérard fait partie intime du CIÉF depuis le début pour moi, il est indissociable de toute ma perspective sur l’association. Je ne peux penser au CIÉF sans penser à son courage, sa force de conviction, sa générosité. Depuis 2004 aussi, en tant que membre du Comité scientifique de Nouvelles Études Francophones, il m'apportait son soutien inconditionnel, m'aidant à reprendre courage lorsque je faiblissais devant l'immensité des tâches à accomplir.

Quelle perte énorme pour moi et pour le CIÉF. J’ai du mal à imaginer comment nous allons continuer sans lui. C’était une vraie présence au sein de l’association, “vraie” dans le sens le plus plénier du terme. Il m'a touché le coeur. Je lui souhaite un beau voyage au pays des grandes âmes, en gardant confiance que nos destins continueront à être liés!

Gérard Étienne en Guadeloupe, 1997

Ayant vu cette photographie, Aurélia Roman commente:

Photo symbolique: Gérard entouré de la riche végétation caractéristique aux pays de sa naissance et offrant des fruits frais. Oui, il nous a laissé les fruits de son esprit, de son âme. Et ils resteront frais tant que nous vivrons.

 

Photo C. Perry ( © CIÉF)
(copie tirée d'un imprimé)

 

Henri J. Piquion (14 décembre)

ADIEU GÉRARD

De l'avoir toujours appelé Gévé depuis l'époque de mes culottes courtes j'en arrivais parfois à oublier son nom: GÉRARD VERGNIAUD ÉTIENNE. Poète, romancier, essayiste, journaliste, linguiste, professeur, il aura été toute sa vie un ami fidèle et dévoué, un père et un mari exemplaire, mais surtout, oui surtout, le porte-drapeau de ceux qui refont quotidiennement Vertières depuis qu'il y a bientôt 20 ans Rochambeau s'est caché sous le masque hideux de lavalas-lespwa pour reprendre ses œuvres d'assassinats, de tortures, d'inhumanisation et d'abêtissement du peuple haïtien.. Gérard est mort les armes à la main.

Nous nous sommes parlé jeudi le 11 décembre. Tout en faisant état de certaines difficultés -normales- il me disait se sentir beaucoup mieux que depuis quelque temps. Notre conversation, exceptionnellement longue ce jour-là, a porté essentiellement sur la nécessité d'une intervention massive dans le dossier du créole abandonné depuis trop longtemps à de faux savants inféodés à des politiciens incultes. Il m'avait appelé pour m'apprendre qu'à la suite d'une conversation avec un des ses amis linguistes, il avait décidé de publier sa thèse sur la langue créole. Cela faisait longtemps déjà que je lui demandais non seulement de le faire, mais aussi d'intervenir régulièrement dans ses chroniques ou sur Internet en vue d'apporter quelque lumière dans ce tunnel. Il fallait plus qu'une voix. Rêvant de voir le créole s'épanouir, on pouvait croire possible jusqu'à une concertation entre des gens de culture pour "la défense et l'illustration" de la langue créole comme cela s'est fait pour d'autres langues en d'autres temps. Ce jeudi-là j'ai dit à Gévé, et il en était conscient, que ce serait faire œuvre patriotique que de publier cette étude qui devait être, à mon avis et nous avons été du même avis, précédé d'un avant-propos qui établisse la relation entre CE créole lavalassalisé, infantile, infantilisant et la profondeur de la dictature. Avec la mort de Gérard il est encore plus urgent de dire qu'une langue ne saurait se réduire à une forme d'oralité anarchique (ministè lévasyon nanchonnal) mise en symboles graphiques. Le problème est aujourd'hui plus politique que scientifique, mais c'est par un investissement scientifique qu'on parviendra à la dépoliticianiser.

Lire la suite du texte en fichier pdf.


Aurélia Roman (15-16 décembre)

Ce n'est pas possible... Je viens d'apprendre l'impossible nouvelle: Gérard, notre grand écrivain, notre cher ami, celui qui nous encourageait, qui nous inspirait, qui nous donnait toujours de l'espoir et dans l'entourage de qui on se sentait meilleur, celui dont la voix résonne encore dans mon âme, pleine de générosité, oui, d'une générosité unique, Gérard Etienne n'est plus... C'est trop inattendu, trop incroyable, trop inadmissible...

Le CIÉF ne sera jamais le même sans lui. Mais sa mémoire sera toujours avec nous, ceux qui avons eu le bonheur de le connaitre, de l'écouter, de le lire.

- - -

Hier soir j’ai lu l’incroyable nouvelle. Je n’ai pas pu dormir: la figure de Gérard, de notre grand ami, sa voix pleine de passion, les maintes rencontres et conversations, sa présence à Limoges (il est venu assister et parler à notre session, au bras de Jean-Marc), son sourire, sont restés dans mon esprit jusqu’à la lueur du matin.. Un matin qu’il ne verra pas...Je le vois à la Martinique, à Toulouse, à la Nouvelle Orléans, à Ottawa, à tous nos congrès... Ils ne seront plus les mêmes sans lui... Présent sera dorénavant son souvenir seulement...

Oui, nous garderons son souvenir, perle précieuse au collier que nous portons dans l’âme.

Natania, recueil de poèmes Gérard Étienne

Description du livre, tirée du site des éditions du Marais:

Louis Aragon avait créé toute une sensation dans les milieux littéraires avec son chant, "Les Yeux d'Elsa". Gérard Etienne, à son tour, immortalise la femme, celle qui partage sa vie depuis quarante ans et qui l'aura sauvé plusieurs fois de la mort. "Natania" est l'un des plus beaux chants d'amour publié en littérature québécoise. C'est aussi un récit dans la mesure où il tient lieu de témoignage, de confession et d'histoires racontées les yeux fermés à ceux et à celles qui croient en la force d'attraction d'un chant littéraire.

Sur ma table un livre ouvert qui vient d’arriver, le livre dédié à son épouse, à la belle et courageuse Natania. J’entends sa voix, il parle à Natania, il parle à toutes les femmes qui savent “entendre une chanson d’amour” (p. 41).

Au Congrès du CIÉF à Sinaïa, sur la terrasse, la conversation était animée. Gérard gesticulait, expliquait, nous faisait réfléchir.

“Gérard, pourquoi n’écris-tu pas une pièce de théâtre? Tu la portes en toi depuis longtemps,” lui ai-je dit. Il me regarda fixement. “Oui, c’est vrai! Je la vois. Je te promets, Aurélia, un projet sera prêt avant Noël." Et il a tenu sa promesse, la pièce a été finie, jouée, et publiée.

Annonce de la pièce de théâtre de Gérard Étienne

J’ai eu le bonheur de présenter dans ma communication au Congrès du CIÉF à Cayenne son émouvante œuvre Au bord de la falaise, œuvre d’une surprenante originalité de style. J’espère voir un jour la traduction en roumain.

Pourquoi, pourquoi, les bons s’en vont-ils? Sa bonté nous enveloppait.

Adieu, cher Gérard!

 

Judith Sinanga (Ohlmann) (24 décembre)

Gérard Étienne vient de nous quitter ? Non, Gérard Étienne n’est pas de ceux qui disparaissent. Il vivra toujours à travers son combat pour la justice, sa recherche pour la vérité, son audace lorsqu’il s’agissait de dénuder les malfaiteurs, les corrompus, les criminels. Il n’était pas de ceux qui écrivent uniquement pour raconter. Son écriture était prophétie. Sa voix et son imagination – celles des sages de partout : Haïti, France, Canada, Afrique ... Un écrivain qui dérangeait pour ranger et pour changer la société, simplement transformer les hommes. Il aura était pour moi un ami, un conseiller, un père. De lui me sont venues toutes sortes d’inspirations. Depuis que j’ai mis le doigt sur son oeuvre, je n’arrête pas de me demander qui je suis, ce que je fais pour ma société, ce qu’il faudrait faire pour l’améliorer, pour changer le monde ... C’est un grand homme Gérard Etienne, une voix qui a tant changé ma façon de voir la vie, les humains. Haitïen ? Canadien ? Certainement, mais plus encore en ce qui me concerne, un « Vieux » de chez moi, de la vieille Afrique tout simplement.

 

Thomas Spear (15-19 décembre)

"Adieu au juif nègre, Gérard Étienne" (cliquez sur le lien)

(Consultez également la page consacrée à Gérard Étienne sur le site Île en île où vous trouverez, en bas de la première page de son dossier, des liens vers d’autres articles; le dossier comprend également 2 bons enregistrements de sa voix et un entretien avec Ghila Sroka.)

 

Bruno Thibault (17 décembre)

Certains disaient de lui que c’était “un homme fort en gueule” (ce qui, je crois, n’était pas pour lui déplaire) mais chacun savait qu’il avait appris le poids des mots dans sa chair, et même sous la torture. Sa voix s’est éteinte aujourd’hui mais son écho sonore et son œuvre demeurent. Gérard Étienne, par sa participation au dernier congrès du CIÉF, malgré sa fatigue et malgré sa santé fragile, nous a donné un beau modèle à suivre.

 

Maria G. Traub (20 décembre)

Je rends hommage à un gentilhomme, un professionel, un écrivain, et un être humain plein d'intelligence, d'esprit, de joie de vivre, et d'humilité. C'était un privilège pour moi de faire sa connaissance et de lire ses écrits. Il va nous manquer et ses oeuvres vivront parmi nous.


Pascale Vergereau-Dewey (15 décembre)

Quelle triste nouvelle ce matin, en effet, c’est une perte immense pour le CIÉF et pour la francophonie. Je nous revois discutant devant la mairie de Limoges (ma ville natale) cet été. Ce fut un choc car j’ignorais ses ennuis de santé et il était bien affaibli. Pourtant quelle énergie et conviction durant la table ronde et nos discussions.

 

Abdourahman Waberi (17 décembre)

Hommage à Gérard Étienne, connu pour son franc-parler

J'ai rencontré Gérard Étienne pour la première fois à Abidjan lors du premier congrès du CIÉF en Afrique noire. Je ne fus pas déçu. Les rires fusaient dans le salon de l’hôtel Ivoire. Très vite, nous nous sommes bien entendus car Gérard Étienne savait entourer d’affection l’attention qu’il portait à ses collègues plus jeunes que lui. Il n’était pas avare de compliments à leur endroit. Avec le doux Émile Ollivier, Gérard Étienne représentait, pour moi à tout le moins, le potomitan de la communauté haïtienne du Québec. Reste leur œuvre à (re)découvrir.

Salut à toi Gérard et passe le bonjour à Milo.

 

Werewere-Liking et Nserel Njock et tout le Groupe Ki-Yi Mbock d’Abidjan (15 décembre)

Nous recevons à l’instant la triste nouvelle. Nous nous empressons d'envoyer nos sincères condoléances à la famille éplorée. Malgré la grande distance, bien sûr, nous serons “de cœur” avec vous à son enterrement et à toute cérémonie d’hommage qui lui serait rendue.

 

Lélia Young (15 décembre)

La perte de Gérard m’a terriblement bouleversée! Il sera un exemple pour celles et ceux qui ont su l’apprécier. Gérard savait briser le silence devant les injustices, les souffrances et les inhumanités de toutes sortes, il sera difficilement remplacé.